La place de l'homme dans les chaînes robologistiques

Le secteur de la logistique est, aujourd’hui encore, fortement consommateur de main d’œuvre. Il a besoin et s’appuie sur l’Humain pour fonctionner. La machine reste au service de l’Homme. Demain, l’automatisation des solutions pousse vers un changement de paradigme, où il y aurait moins d’Humains et plus de machines. La question de la place de l’Humain est donc centrale et elle doit être prise en compte, parce qu’elle soulève de nombreuses questions.
 

Chaîne de tri des colis STO Express (Chine) - Crédits : Agencia EFE
Chaîne de tri des colis STO Express (Chine) - Crédits : Agencia EFE


 

Le robot peut-il remplacer efficacement l’Homme sur tous les maillons ?

À court et à moyen terme il est possible de se demander ce que ferait le robot face à une cage d’ascenseur, lorsque le destinataire est absent ou lorsque le numéro de la maison ou de l’appartement a été mal renseigné. Aujourd’hui, il envoie un SMS au destinataire. Mais que faire si le destinataire n’est pas à son domicile ?

On peut aussi se poser la question de savoir comment se ferait le transfert de responsabilité et/ou de marchandises entre deux camions si ceux-ci sont autonomes. Ces questions renvoient à la capacité d’adaptation de l’Homme face à des situations imprévues (nombreuses dans le cas de la livraison de marchandises et plus généralement en logistique) là où le robot dispose d’un panel d’actions précisément codées auxquelles il ne peut déroger.
 

Quelle réelle autonomie du robot  ? Un simple exécutant ? - Crédit image : DR
Quelle réelle autonomie du robot  ? Un simple exécutant ? - Crédit image : DR


 

La place de l’Homme et les métiers sont amenés à évoluer

Les solutions automatisées ne peuvent donc pas encore répondre efficacement à TOUS les cas de figure… sans l’aide de l’Humain. Aujourd’hui, aucune de ces solutions n’est envisagée sans que l’Humain intervienne (directement ou indirectement), par exemple :

  • Les camions automatisés de Rio Tinto (Mine) sont supervisés par un centre de contrôle
  • Les robots livreurs de Starship à Londres sont monitorés depuis l’Estonie par des opérateurs etc…

L’Humain ne disparaît donc pas des process; sa place évolue : de conducteur à télé-opérateur, d’opérateur à superviseur, de nouveaux postes liés à la maintenance etc… Pour prendre l’exemple d’Amazon en France : le groupe finalise actuellement l’installation d’un entrepôt à Brétigny-sur-Orge (145,000m², prêt fin 2018) équipé notamment de robots Kiva (goods-to-man). Il prévoit sur toute la France d’embaucher 2,000 personnes notamment dans le but de maintenir, de superviser et de réfléchir à la mise en place de ces solutions robotiques. Il apparaît nécessaire de bien réfléchir à la formation ou à la conduite du changement qui accompagne irrémédiablement ces solutions.
 

Robot Kiva dans un centre de distribution d'Amazon à Tracy (Californie) - Crédit photo : Amazon/Challenges.fr
Robot Kiva dans un centre de distribution d'Amazon à Tracy (Californie) - Crédit photo : Amazon/Challenges.fr


 

Quelle acceptabilité vis-à-vis de ces solutions ?

Si les solutions techniques deviennent un jour opérationnelles, la question de l'acceptabilité sociale relève d'une autre complexité. Par exemple, acceptera-t-on de rouler à côté d'un 32 tonnes sans chauffeur ? Les consommateurs accepteront-ils d'être livrés par un robot ?

L’acceptabilité doit aussi venir des communautés de professionnels : pour de nombreux opérateurs de transport, le coursier livreur représente la société. Il est le moyen de garder un contact avec le client. Par ailleurs, à court terme, la question de l'investissement pour déployer ces solutions robologistiques est posée, de même que la capacité à faire évoluer une culture métier du transport et de la logistique, où l'Humain a un rôle central.
 

Être livré par un robot ? - Crédit photo : DR
Être livré par un robot ? - Crédit photo : DR

 

Cédric Cariou, Département Mobilité et transports, Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région d'Île-de-France - IAU IdF

Corinne Ropital, Département Economie, IAU IdF